lundi 1 septembre 2014

[Archive 27 et 28/05 2014] Ingram, Createspace et la distribution globale

J'ai récemment été averti par un auteur de deux vendeurs tiers de la place de marché Amazon (Amazon marketplace) pratiquant des rabais inquiétants sur mes livres papier neufs. Je savais déjà qu'Amazon avait la possibilité de solder mon livre papier, et cela me va du moment que mes revenus d'auteurs continuent à correspondre au prix que j'ai défini (ce qui est le cas). Je ne suis pas un grand supporter du prix unique du livre, parce que j'estime que cette loi est un moyen pour les éditeurs de continuer à vendre leurs livres à des prix trop élevés pour une grande partie des lecteurs (et là, je pense particulièrement à l'ebook). Non, ce qui me gêne dans ce concept de livres neufs écoulés par des vendeurs tiers, c'est la perte de contrôle que cela engendre pour l'auteur autoédité.



Les deux vendeurs qui pratiquent ces remises sont livres_allemands et books_and_music. Si vous cliquez sur ce lien, vous vous apercevez qu'amazon n'est plus le seul à vendre mes livres papier à l'état neuf (l'onglet du dessus spécifie bien "neuf à partir de"). Cela a été une surprise pour moi, puisque Amazon est le seul vendeur en principe habilité à écouler mes livres papier fabriqués par Createspace.



En principe... car il m'est revenu que j'avais opté chez Createspace pour la "distribution étendue" qui permet à mes livres papier d'être vendus chez de grands libraires aux Etats-Unis. Createspace, afin de distribuer mes livres papier aux Etats-Unis, fait appel à une grande société spécialisée dans la distribution, Ingram.



Ingram a la particularité de posséder des imprimeries à la demande parmi les plus performantes au monde, et détient notamment la société Lightning Source (dont j'utilise aussi les services pour des livres que je distribue et vend moi-même), et Ingram Spark, qui s'adresse à des auteurs autoédités (auquel je n'ai pas recours). Et Ingram fait appel à des partenaires pour la distribution de livres.



Or, il se trouve que les deux vendeurs que j'ai cités en début d'article, livres_allemands et books_and_music, après vérification de l'auteur qui m'avait alerté, (on peut retrouver le numéro de TVA en cliquant sur le lien du vendeur chez Amazon, puis il suffit de se rendre sur ce site pour l'identification), correspondent à un prestataire nommé The Paperback Shop. Prestataire qui n'est autre que l'un des partenaires d'Ingram, comme l'atteste ce document



Au passage, si vous vous intéressez à la création de jeux vidéos, n'hésitez pas à acheter l'ebook de l'auteur qui m'a prévenu.



Après mûre réflexion, je crois avoir reconstitué les pièces du puzzle. L'auteur qui m'a prévenu ne passe pas par Createspace, mais par Ingram Spark. Ma théorie, c'est que The Paperback Shop, en tant que prestataire d'Ingram, distribue à la fois les livres de Createspace et d'Ingram Spark sur le territoire européen. The Paperback Shop est donc aussi comme on l'a vu un vendeur tiers Amazon.



Pourquoi Amazon permet-il à ces vendeurs de proposer des livres neufs sur son site, sur les pages des auteurs faisant appel à Createspace? Tout simplement pour favoriser la concurrence et rendre les livres plus attractifs en faisant baisser les prix, y compris des ouvrages d'auteurs autoédités.



A la suite de divers échanges avec Createspace, il apparaît que ces livres vendus par des vendeurs tiers, même à prix plus bas, donnent droit à des revenus d'auteurs équivalents aux livres vendus par Amazon directement. C'est aussi valable pour Ingram Spark. Je cite texto la réponse qui m'a été faite chez Lightning Source: "You will always receive the same publisher compensation, some of the third party sellers are our channel partners and any that aren’t would still need to order through one of our listed wholesale channels so we would always have record of any sales." "Vous recevrez toujours le même revenu d'auteur, certains des vendeurs tiers sont nos partenaires, et ceux qui ne le seraient pas auraient tout de même besoin de commander par nos canaux où figurent vos prix de vente, donc nous aurions une trace de chacune des ventes."



J'ai bien réfléchi à la situation. Ces vendeurs tiers, à ma connaissance, lorsqu'ils obtiennent une commande d'un client Amazon, ne permettent pas une remontée en classement de mon livre sur le site d'Amazon. Seule une vente par Amazon (j'en suis presque certain, mais cela reste à vérifier) permet la montée dans le classement des ventes de mon livre. La conséquence logique, c'est que je n'aurais conscience de cette vente que lorsque Createspace la fera figurer dans mon tableau de droits d'auteur sur son site.



Oserais-je dire, si Createspace fait figurer cette vente sur le tableau de bord? En étant un peu parano, on peut imaginer une société écran chargée de vendre au plus bas prix sans que l'auteur ne soit tenu au courant d'une seule des ventes. Qu'on me pardonne ma défiance, je suis romancier, j'ai de l'imagination.



Autre fait troublant, lorsque je me suis inquiété de savoir ce que devenaient les fichiers de mes livres (les fichiers qui permettent à l'imprimeur de les fabriquer), voici ce que m'a répondu l'employé de Createspace: "If you have made your title available through Expanded Distribution, your files may be sent to the distributors with whom we have a relationship in order to expedite order fulfillment. Please be assured that your files will not be sent to additional outlets by CreateSpace or these distributors. " "Si vous avez autorisé la Distribution Etendue, vos fichiers peuvent être envoyés à des distributeurs avec lesquels nous sommes en relation, afin de satisfaire la commande. Soyez je vous prie assuré que vos fichiers ne seront pas envoyés à des organes additionnels par Createspace ou ses distributeurs."



L'un de nos défauts à nous autres autoéditeurs (en tout cas le mien), c'est que nous aimons garder le contrôle. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons choisi de la jouer solo, nous haïssons l'absence de transparence des éditeurs, l'absence de vision et la précarité qui en résulte (ou en tout cas le sentiment de précarité).



Là, on se rend bien compte que la distribution étendue génère toute une série d'inconnues. Nos fichiers se mettent à se balader sur leurs petites pattes électroniques, des vendeurs que nous ne connaissons ni d'Eve ni d'Adam se mettent à faire le business quasiment à notre place, et les moyens de contrôle ne dépendent que de la bonne volonté de partenaires comme Createspace.



J'ai donc pris à titre préventif la décision de ne plus passer par la distribution étendue avec Createspace, pour tous mes livres sauf un: The Breath of Aoles. J'ai gardé la distribution pour celui-là, me disant que je pouvais sacrifier d'éventuelles ventes non répertoriées à une meilleure visibilité chez des distributeurs en ligne comme Barnes&Noble, visibilité qui pourrait être bénéfique à la vente d'ebooks, prédominante dans le domaine de la Fantasy aux Etats-Unis.



Il faut évidemment faire attention quand vous supprimez de la sorte un ou plusieurs distributeurs, car si vous vendez, votre classement sur d'autres plates-formes de vente va s'effondrer. Il n'est d'ailleurs pas du tout évident que cette manoeuvre me permette de ne plus avoir ces vendeurs tiers en lien sur chacun de mes livres papier. Nous verrons, ce genre de changement prend un certain temps avant d'être effectif.



Si Amazon et Createspace souhaitent me rendre plus confiants sur le sujet, à eux d'amener un peu plus de transparence à propos de ces vendeurs tiers, en me permettant par exemple de savoir sur mon tableau de bord d'où provient une vente (à défaut du nom du client, au moins celui du vendeur). Il serait bon que les ventes de livres neufs par des vendeurs tiers fassent remonter le classement sur le site d'Amazon. Je veux bien travailler avec d'autres gens qu'Amazon, Createspace ou Lightning Source, mais il faut au minimum que les conditions d'une relation de confiance soient établies. 

28/05/2014 - Distribution étendue Createspace : une réponse d'Amazon 

Suite à l'article d'hier intitulé Ingram, Createspace, Amazon et la distribution globale, Amazon a envoyé une réponse à un autre auteur qui leur a posé des questions après que je l'ai prévenu. Cette fois-ci, c'est l'équipe Amazon.fr qui a répondu. La réponse contient un lien très intéressant qui permet de signaler directement à Amazon des prix trop bas. Mes réflexions juste après leur réponse. N'oubliez pas aussi de lire les commentaires du premier article.



Voici la réponse d'Amazon.fr non retouchée:



Bonjour,

Suite à votre email , je comprends que vous vous interrogez sur le prix de vos livres sur notre site Amazon.fr.

Tout d'abord, notre politique de prix se traduit par la pratique constante de prix bas sur toute notre gamme de produits, tout en maintenant le niveau de qualité de nos services qui fait notre réputation. Nous n’avons cependant pas de politique d’alignement de prix sur nos concurrents. Dès lors, il est possible que vous puissiez acheter un article à prix plus bas chez un autre commerçant.

J'ai effectué des recherches  et vous informer que les livres dont vous m'avez envoyé les liens sont actuellement proposés sur la plateforme Marketplace d’Amazon à la fois par Amazon et par des vendeurs tiers.

Les livres vendus par des vendeurs tiers sur la plateforme Marketplace sont signalés avec le message « Disponible chez ces vendeurs » qui remplace l'indication du prix Amazon. Dans d'autres cas, ils sont listés sous le prix Amazon avec le mention "neuf" ou "d'occasion".

Les vendeurs collectent des livres d’occasion ou les achètent en gros chez les éditeurs.

Ils sont libres de fixer leurs propres prix. Les offres de la plateforme Marketplace ne peuvent pas être supprimées.

Néanmoins, si un de vos livres est vendu à l'état neuf par un vendeur et que la différence de prix est supérieur ou inférieur au prix fixé par l'éditeur,  nous vous demandons de remplir le formulaire ci-desous :

https://www.amazon.fr/gp/help/reports/infringement 

Ce formulaire est ensuite traité par notre équipe légale qui vérifiera si le vendeur viole ( ou non) la loi Lang sur le prix du livre. Je vous invite à bien préciser l'objet de votre demande dans la case "informations supplémentaires.


A bientôt sur Amazon.fr



Voici maintenant mes réflexions :



- Il est très étonnant qu'Amazon dise qu'il n'a pas de politique d'alignement des prix sur la concurrence, alors que pour les ebooks, Amazon les aligne automatiquement sur le prix le plus bas (peut-être la réponse ne portait-elle que sur les livres papier). En même temps, comme je l'avais signalé dans mon article, Amazon se bat (et est en train de se battre, contre Hachette) pour obtenir la possibilité de pratiquer des remises sur les ventes de livres et d'ebooks, tout en continuant à payer l'intégralité du prix des livres aux éditeurs et autoéditeurs. C'est dans leur ADN d'obtenir les prix les plus bas pour leurs clients (l'équivalent de Leclerc chez nous, en quelque sorte).



- J'ai personnellement rempli le formulaire d'infringement pour tous mes livres



- Je ne crois pas vraiment à l'explication "les vendeurs achètent les livres en gros chez l'éditeur": cela ne m'est jamais arrivé qu'on m'achète des livres en gros. Pour moi, il y a un danger très clair qu'un imprimeur à la demande fabrique illégalement nos livres et les vende dans notre dos, ou plutôt sous notre nez, sur le marketplace amazon. Ce danger persistera tant que les rapports de vente ne feront pas état clairement des ventes effectuées par les vendeurs tiers, et tant qu'Amazon ne fera pas en sorte que les ventes par des vendeurs tiers sur son site déclenchent la remontée en classement d'un livre.



- d'après la réponse faite, j'en déduis que les liens d'achat marketplace ne disparaîtront pas, mais qu'Amazon va demander un alignement des prix aux vendeurs sur le neuf. A noter que pour l'auteur Jacques Vandroux (voir les commentaires du premier article), les vendeurs tiers ont disparu aussitôt qu'il a supprimé la distribution globale pour son livre (réaction ultra rapide). Chez moi, un vendeur sur deux a été supprimé. Pour mon dernier livre, Votre santé c'est notre avenir, le vendeur tiers pratique 26% de réduction, ce qui le met à 11€! (En fait, la réduction est bien moins importante si l'on tient compte des frais de port. N'hésitez pas à en profiter si vous vous sentez de l'acheter, mais dans ce cas, envoyez-moi un mail pour me prévenir, afin que je puisse vérifier si la vente apparaît sur mon tableau de bord.)



- la réponse d'Amazon lui permet de rester à peu près dans les clous par rapport au prix unique du livre, mais on voit qu'il y a quand même pas mal de contradictions. L'explication tient à ce qu'Amazon s'efforce de rester dans la légalité tout en appliquant sa propre politique.



[EDIT 03/06/2014] : Problème réglé pour tous mes livres Createspace.

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